Le bulletin Automne 2014, no 34 ayant comme thème la guerre 1914-1918, aussi appelée la Guerre des nations ou la Grande guerre, je profite de l’occasion pour faire raconter à mes cartes postales une petite partie de cette guerre. Elles montraient à ceux demeurés ici pour attendre le retour d’un des leurs ce à quoi pouvait bien correspondre le théâtre d’opération des soldats ou leurs lieux d’entraînement.

Comme membre du Dominion anglais, le Canada entre en guerre contre les Allemands en même temps que l’Angleterre, le 4 août 1914. À cette époque, les jeunes hommes qui joignent l’Armée canadienne pour défendre leur patrie le font tout à fait volontairement. Après s’être entraînés au Canada, ils rejoignent les troupes du Dominion en Angleterre pour parfaire leur entraînement au maniement des armes. En octobre 1914, un premier contingent part pour l’Europe. Les fantassins canadiens français sont mêlés aux bataillons canadiens anglophones et les quelques officiers de langue française n’ont aucune chance de parvenir aux plus hauts grades.

L’élite francophone du Québec s’insurge alors contre cet état de fait et réclame du gouvernement central la création d’une unité uniquement de langue française. Le gouvernement Borden acquiesce à cette demande et le 21 octobre 1914 est créé le Régiment Royal Canadien-Français auquel on ajoute la désignation de 22e. Son nom officiel est le « 22nd Infantry Bataillon (French-Canadian) ». C’est le Royal 22e d’aujourd’hui. Les militaires s’entraînent d’abord à Saint-Jean-sur-Richelieu, mais le lieu devenu vite inadéquat, en mars 1915 les manœuvres d’entraînement déménagent à Amherst en Nouvelle-Écosse. En mai 1915, cette unité de soldats uniquement francophones s’embarque pour l’Angleterre, se rapprochant ainsi des champs de bataille. L’armée anglaise continuera de parfaire leur habileté à manier les armes de plus gros calibre. Ils pourront aussi apprendre à coordonner leurs efforts à ceux des militaires venus de partout dans les pays du Dominion anglais, dont l’Australie.

C’est le navire Saxonia, construit en 1900, qui les transporte ainsi vers l’Europe à partir du port d’Halifax. On le voit ici alors qu’il avait été transformé par la compagnie maritime Cunard en bateau de croisières après la fin de la guerre, bénéficiant ainsi d’un destin beaucoup plus paisible.

En septembre 1915, le 22e traverse la Manche pour débarquer en France avant de repartir vers sa destination finale à Ypres en Belgique, où ces courageux soldats y construiront et feront une guerre de tranchées aux Allemands afin de maintenir leur position jusqu’au printemps de 1916.

On voit sur cette carte postale-photo un de ces soldats Canadiens-français du 22e bataillon, mon grand-père Raymond Bourbeau, originaire de Saint-Hyacinthe. Les cartes postales suivantes illustreront bien le triste spectacle auxquels ils ont été confrontés en Belgique, outre de supporter le froid et l’humidité de l’hiver belge, en plus des gaz qu’utiliseront les Allemands à partir de ce printemps de 1916.

Sur cette image, mon grand-père est en congé à Brighton, station de vacances prisée des Anglais sur la côte anglaise.

Sur cette carte postale de la compagnie française L.L., on constate les dégâts qu’ont causés les canons de 75mm Français sur le sol de la Flandre belge.

L’arrière de cette carte postale est aussi intéressant que l’image. Du côté correspondance, à la fin de son message il est noté que le militaire belge Louis Van Eckowen envoie ce message à son ami militaire alors qu’il est au front.

Le destinataire, le soldat canadien maskoutain Emile Robert, est encore en Angleterre. Le timbre postal est de la poste militaire de Belgique.

Dans toutes les guerres, qu’elles soient modernes ou plus anciennes comme celle de la Grande guerre de 14-18, ce sont d’abord les civils qui sont les plus touchés. On voit sur cette carte postale d’époque des citoyens Français debout et sans mots devant les ruines de leur village.

À l’arrière, l’éditeur note : « près de Reims, Senlis fut rasée par l’armée allemande. C’était une jolie ville du Vieux continent » (traduction). Cette carte postale fut éditée par l’International Service News. Ce service de presse des Etats-Unis fut fondé par le magnat de la presse bien connu Randolph Hearst en 1909. Malgré son opposition à ce que les Américains entrent dans une guerre européenne, il envoya tout de même sur ce théâtre de guerre des reporters et journalistes de son agence. Comme quoi on peut bien supporter critiques et contradictions personnelles lorsque le profit est en jeu!

Cartophilement vôtre!

Jean-Pierre Bourbeau, Histoire et Archives Laurentides

Sources :

1) Wikipedia, l’histoire du 22e régiment

2) Bernier, Serge, Le Royal 22e régiment, Les Éditions GID, Québec, 2013.